La responsabilité des États-Unis
Il y a à peine quelques semaines [1], Hun Sen, le président du Cambodge, proche des Khmers rouges jusqu’en 1977, a accepté l’idée d’un procès contre ces derniers pour crimes de guerre. Cela voudrait dire qu’il serait poursuivi, lui aussi. Le procès s’attacherait à la période allant de 1969 jusqu’à la fin du pouvoir khmer rouge, il y a dix ans à peu près. Ce que l’on appelle la "décennie de génocide" dans la seule étude gouvernementale indépendante disponible, Kampuchea : Decade of Genocide - si vous voulez utiliser ce mot - s’est étendue de 1969 à 1979. Les six premières années furent parrainées par les États-Unis, et ce n’était pas de la rigolade.
Très récemment, un ami de Phnom Penh m’a envoyé un article de la presse cambodgienne sur François Ponchaud, un prêtre français qui a écrit l’un des premiers livres sur les atrocités des Khmers rouges au Cambodge, où il avait été missionnaire [2]. On lui a demandé ce qu’il pensait des procès pour crimes de guerre des Khmers rouges et il a répondu qu’ils devraient aussi concerner les États-Unis. Donc oui, des procès honnêtes devraient concerner les gens qui ont commis des crimes. En font partie ceux qui ont commandité l’un des bombardements les plus intenses de l’histoire sur une société paysanne pratiquement sans défense, au Cambodge, au début des années 1970.
De la propagande, Paris, 2003, pp. 131-2.