Guillaume Villeneuve, traducteur
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Le bel anglais

mardi 1er janvier 2008, par Guillaume Villeneuve


Le prince Charles est profondément attaché aux rites traditionnels de l’Église d’Angleterre, et en particulier au Book of Common Prayer, qu’il a décrit en 1997 comme “la partie la plus glorieuse de notre patrimoine et destinée à toute la communauté.” À la question de savoir “pourquoi ce Prayer Book compte-t-il tant, et quel est le saint mystère de sa langue ?” le prince répondait : “parce que, comme l’a montré sa survie même au cours des siècles, sa langue et sa liturgie respectent un profond besoin humain de continuité et de permanence - elles ne sont pas d’une période donnée, mais de tous les temps.”

Pour lui, “le génie du livre de Cranmer réside dans son expression du sens du sacré grâce au pouvoir et à la majesté de la langue afin, comme le dit la Collecte, que ‘Parmi les changements divers et variés du monde, nos cœurs soient fixés sur les vraies joies’.” Dans ce contexte, il rappelait à l’auditoire de la Prayer Book Society que “L’Église orthodoxe, par exemple, n’a jamais perdu, abandonné ou diminué la beauté sacrée et le symbolisme de sa liturgie. La grande tristesse dévastatrice qui m’atteint, comme vous tous j’en suis sûr, est de voir que nous semblons avoir oublié que dans les occasions solennelles, il nous faut une langue exceptionnelle et solennelle : quelque chose qui transcende la langue quotidienne. Nous louons la ‘beauté de la sainteté’ mais nous oublions la sainteté de la beauté.”

Ce qui conduit le prince à quelques observations sur la langue, qu’il reprendra en parlant d’éducation :

“Si nous encourageons l’usage d’une langue vulgaire, triviale, ordinaire, cela revient à encourager un point de vue vulgaire, trivial, ordinaire sur le monde où nous vivons. Bien des gens considèrent avec effroi ce qu’il advient de notre langue là même où elle s’est constituée. Ils se demandent ce qui se passe dans notre pays et notre société pour que sa langue s’appauvrisse à ce point, se fasse si relâchée et limitée - pour que nous soyons entrés dans une terre vaine aussi consternante de banalité, de clichés et d’obscénité routinière. Pour beaucoup, c’est une tragédie absolue qu’on ait renoncé à l’idée que l’anglais s’apprend par l’effort et l’application, par une longue pratique attentive de ceux qui ont su habiller leurs pensées de la langue la plus précise, vivante et mémorable."

Extrait de Charles d’Angleterre, Un prince militant, Le Rocher 2008


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