Les cloches sonnent à toute volée dans les allées,Blanche la brume sur l’herbe.À présent les Julia, les Maeve, les MaureenLongent les champs pour aller à la messe.Des arbres racornis aux petites pommes vertes,Gardent la chapelle proprette et blanchie à la chaux,Des portes dorées, un chambranle grené,Des fenêtres en ogive richement historiéesDe vitraux polychromes.Vois-tu les congrégations de noir voiléesFixer les vêtements liturgiques brodés,Murmurer devant les stations peintesQuand Ton Sacré Cœur révèleLa grasse Kildare aux champs parfumés,Roscommon, fluette dans les ombres des frênes,Westmeath se mirant dans son lac,Leix tentaculaire gardée par ses collines,Toutes agenouillées dans un halo d’argent ?Entre ifs et chèvrefeuille, murs et boules-de-neige,Enfoncés dans les orties reposent les fidèles ;Les lieues serpentines de sureau fleuri,Le sycomore vêtu de lierre,Les ruines de domaines déserts,Cernés de tourbières, ceints de ronces -Des villes riches ou des villes pauvres commeElles, oh ! il y en a des comtés pourNous protéger au royaume de l’Ouest.Côte rocheuse, lointaine et étrangère,Collines pierreuses ruisselant sur l’espace,Affleurement pierreux du Burren,Pierres dans tous les lieux fertiles,Petits champs piquetés de rochers,Bas-côtés de pierre grise tachetés de safran,Appentis aux murs de pierres, chaumés de roseaux,Où un peuple de l’âge de pierre engendreLes ultimes rejetons de l’âge de pierre européen.A-t-elle tenu, la chaleur de juin ?Elle asséchait les mares laissées par la mer,Quand nous filions ensemble à bicycletteSur les allées inondées de fuchsias.Jusqu’à ce que se dresse, abrupte et solitaire,Une abbaye ruinée, rien que son chœur,Encroûtées de lichens, caressées par le temps,Surgissaient les arches, larges, splendides,Romanes contre le ciel.Là, sous l’égide d’un pinacle,Une famille éteinte attendUne résurrection de l’Église d’IrlandePrès des portes rompues et rouillées.Laine de mouton, paille et fiente recouvrentLes tombes des vieilles filles, des libertins et des amants,Dont le formidable mausoléeChante son propre Te Deum par la mer portéEntre les ardoises descellées.
Extrait de New Bats in old Belfries (1945), recueilli dans l’Anthologie bilingue de la poésie anglaise, Paris, 2005